Le blog de Bachir Sylla

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Santé: Ignace Deen, symbole des maux des structures sanitaires guinéennes

L'hôpital national Ignace Deen, établissement public situé dans le quartier administratif et des affaires de Conakry, la capitale guinéenne, symbolise dans une large mesure, les maux actuels du système sanitaire guinéen, dont certains se traduisent par des problèmes d’infrastructures et d’équipements.

Deuxième plus grand hôpital guinéen en termes de capacités d’accueil, derrière celui de Donka, également dans la capitale,  Ignace Deen tient sur de vieilles bâtisses, tant marquantes par leur vétusté, malgré les travaux d’extension qui ont contribué à étendre ses capacités et à le rénover.

Avec l’apparition de la fièvre Ebola en Guinée, en décembre 2013, les autorités sanitaires guinéennes, appuyées par leurs partenaires, notamment l’ONG WAHA (Women and Health Alliance International), ont multiplié les efforts visant à faire de cet hôpital un établissement sanitaire digne de ce nom.

Un changement perceptible dès l’entrée principale, réaménagée de manière à mieux filtrer les entrées et sorties et à maximiser les recettes en misant sur les recettes tirées des tickets de consultation.

Une relative propreté caractérise également l’enceinte de l’établissement. Les murs défraîchis de ses bâtiments de style colonial ont été aussi retapés et sont devenus plus attrayants, avec ses nouvelles couches de peinture.

Il reste que les nouveaux habits de l’hôpital Ignace Deen tiennent pourtant de la simple cosmétique à la limite, vu l’état des salles d’hospitalisation et toilettes, signe parmi d’autres de la mauvaise tenue de l’établissement.

Des lits d’hospitalisation tiennent à peine debout, certains drapés de couverture de fortune. Des ventilateurs par-ci, des récipients pour malades par-là. Autant d’objets improbables dans un hôpital. Le tout dans un désordre repoussant.

Cet établissement doit au préalable combler son déficit en infrastructures et équipements, « pour jouer pleinement son rôle de structure sanitaire de référence », affirme le docteur Alhassane Barry, médecin-traumatologue, secrétaire général de la section syndicale d’Ignace Deen. Hormis ‘’quelques travaux d’extension qu’il a connus il y a une vingtaine d’années, dit-il, cet hôpital hérité de la période coloniale est resté en l’état depuis sa création’’.

Selon Alhassane Barry, Ignace Deen manque par exemple de matériel de laboratoire et de chirurgie, principalement de matériel d’anesthésie, une situation qui fait que les interventions chirurgicales sont devenues périlleuses.

Les problèmes de fourniture en énergie électrique ne sont pas en reste. Le syndicaliste confirme que faute de courant, certains chirurgiens opéraient par fois à la lueur de la torche et même de téléphones portables.

« Dans un bloc opératoire, en cas de coupure de courant électrique, on est obligé de passer par tous les moyens pour sauver le patient qu’on a sous la main», dédramatise-t-il.

Au total, les patients sont nombreux à redouter une éventuelle hospitalisation à Ignace Deen, en  raison notamment de la faiblesse de son plateau technique, dont celui du service de réanimation. Barry signale toutefois que la plupart des patients admis dans ce service se trouvent généralement en phase terminale.

« Il s’agit, dit-il, de gens qui viennent de l’intérieur du pays, dans une situation quasi-désespérée, ou de gens rapatriés de l’étranger où ils étaient partis pour des soins».

Un dernier problème tient à la faible capacité d’accueil de la chambre froide de l’hôpital Ignace, un casse-tête pour la conservation des corps, au point qu’autorités et usagers n’ont eu de cesse de le déplorer.

 Dans la ferveur de sa prise du pouvoir au lendemain du décès du général Lansana Conté, en décembre 2008, l’ex-chef de la junte guinéenne, Moussa Dadis Camara, s’était indigné publiquement de ce que la Guinée ne disposait pas chambre froide qui aurait permis de garder plus longtemps le corps de l’ancien président guinéen.

Les médias guinéens accablaient récemment la Direction générale de l’hôpital Ignace Deen, accusée d’alimenter son compte au niveau de la Banque centrale de la République de Guinée, au lieu de faire face aux réels besoins en équipements de la structure. L’alimentation dudit compte serait destinée à faire croire que l’hôpital jouirait d’une gestion saine de la part de l’actuelle équipe dirigeante.

Pendant ce temps, des médecins dudit hôpital, ainsi que certains de leurs homologues de l’hôpital Donka sont poursuivis en justice pour non-assistance de personne en danger. On les accuse de négligence ayant entrainé la mort d’une femme enceinte, en début de cette année, dans les couloirs de la maternité de Donka, où elle a été admise pour accouchement. A la barre du tribunal de Première instance de Dixinn, les accusés ont tous invoqué le manque de matériels stérilisés nécessaires pour faire face à une opération par césarienne de la dame dont la mort rocambolesque avait ému plus d’un Guinéen.

Curieusement, il y a tout un mystère autour du budget de l’hôpital d’Ignace. En tout cas nous avons tenté en vain d’avoir une idée claire à ce sujet pour chercher à savoir la part réservée aux équipements. Selon certaines indiscrétions, la part belle du budget serait allouée au traitement d’un personnel déjà pléthorique.      

Bachir Sylla

Produit en collaboration avec Ouestafnews grâce à l’appui d’Osiwa   



30/11/2015
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