Le blog de Bachir Sylla

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Kamsar/ MORTELLE MANIF CONTRE L'OBSCURITE

Écrit par Bachir Sylla   
Jeudi, 03 Septembre 2009 10:38

Mohamed Camara, chauffeur, la vingtaine révolue, a été tué par balle, le lundi 24 août, alors qu’il participait à une marche contre le manque de courant dont souffrent les quartiers périphériques de Kamsar. Il y a eu quatre blessées graves par des balles distribuées grâcieusement par les agents de la sécu.

Prises au dépourvu, les autorités locales ont été débordées par ce mouvement spontané et matinal dans les quartiers défavorisés de N’Toumoun, Filima, Kayenguissa, Madina Borobof et le Bagataye, où vivotent travailleurs de la CBG, retraités, commerçants et autres débinards.

«Le lundi, après la prière de l’aube, je m’apprêtais à aller à Boké quand j’ai entendu un bruit assourdissant sur la grand-route. J’ai voulu forcer, mais je me suis heurté à un premier barrage à Kassongoni. On m’a dit qu’il y a d’autres barrages plus loin», explique un chauffeur du syndicat des transporteurs de Kamsar. M.Tidiane Scylla, Prési de la délégation spéciale de la CRD raconte: «Il nous a été impossible de nous entendre avec les manifestants. Ainsi, les militaires nous ont ordonné de replier afin de les laisser gérer la situation pour empêcher les manifestants de s’en prendre aux installations de la compagnie». Les agents n’ont pas tardé à sévir, tirant sur la foule.

Mort  en  direct

«On a tué mon ami sous mes yeux. Il a reçu deux balles au niveau du cou et du dos. Je l’ai vu tomber. Il a traîné au sol. Je l’ai appelé. Il n’a pu ouvrir la bouche. Je me suis évanoui en le voyant mourir. Les gens ont cru qu’on a tiré sur moi aussi», témoigne l’élève, Mohamed Camara. Le jeune Lamarana, rencontré à Sahara, témoigne : «Je me suis approché, pour voir si ce n’est pas un de mes frères que je recherchais. Alors, on a passé un blessé par dessus moi. Son sang a coulé sur ma chemise». Assis sous un manguier, non loin de la gare routière, cet étudiant en vacances à Kamsar affirme avoir vu une vingtaine de soldats tirer des rafales en l’air. «Trois d’entre eux, précise-t-il, sont venus vers nous en proférant des menaces. J’ai dit à mes compagnons de ne pas courir pour ne pas qu’on nous confonde avec les manifestants. Les militaires sont tombés sur moi, ils m’ont brutalisé en me frappant avec la crosse de leur fusil».

Une balle n’est jamais perdue

Dame M’Ballou Fofona a reçu une bastos en pleine fesse alors qu’elle était devant chez elle, à Siminbounyi, dans le quartier Kassongoni. Une balle perdue disent certains. Mais Samba Coulibaly rectifie. «Une balle n’est  jamais perdue. Il a fallu que quelqu’un tire pour que la balle vienne nous trouver, ici devant notre porte. J’étais arrêté à côté de cette pauvre femme et qui, de surcroît, est nourrice. Son nouveau-né n’a même pas quarante jours». Coulibaly est surtout fou de rage contre ces militaires qui sont entrés dans les quartiers pour piller. «Nos enfants n’étaient pas allés manifester. Depuis que le fils du Général Conté a tué quelqu’un à côté d’ici, nous gardons toujours nos enfants à la maison en cas de grève».

La furie du populo

Furax contre les farces de l’ordre, les manifestants ont déposé à l’hôpital le corps de Mohamed Camara et les quatre blessés par balles. Ils ont dû contourner le cordon sécuritaire pour avoir accès à Kamsar-Cité. La mort de Mohamed Camara confirmée, son corps a été transporté au domicile du sous-préfet qui a été saccagé et pillé. La maison du vice-président de la CRD n’a pas été non plus épargnée par les manifestants. Ceux-ci ont en outre bloqué le train minéralier, mis à sac deux postes de gendarmerie à Kassongoni d’où auraient disparu une pétoire PMAK avec ses munitions et un pétard. Le sous-préfet, lieutenant Jean Bosco n’aurait pas supporté le coup. Il serait tombé malade. Il a été hospitalisé. «Aujourd’hui, je ne peux qu’exprimer ma déception par rapport à ce qui s’est passé. Pour le moment, je me réserve de tout commentaire», se contente-t-il de dire à ses visiteurs.

Compassion et promesses

Le Kabinet de la Primature, à la tête d’une forte délégation s’est rendue au domicile de la victime pour présenter les condoléances et les excuses du CnDadis et du gouvernement. Une misère de deux millions de francs glissants a été offerte à la famille pour faire son deuil. Le PM a promis  qu’une délégation gouvernementale sera là pour les cérémonies de sacrifice. Le Kabinet en a profité pour demander aux jeunes de Kamsar de ne pas céder à la manipulation des «chanteurs». Qui fait chanter qui ? Mystère. Les tireurs, eux, sont connus.

Question de fonds

Les problèmes d’électricité sont récurrents dans le corridor Kamsar-Kolaboui-Boké-Sangarédi. En 2005, ils avaient conduit le conseil d’administration de la CBG à promettre une centrale thermique de 4 Mégawatts d’une valeur de 1.800.000 dollars ricains. «Le 20 janvier 2004, au lendemain de l’investiture du Président Conté pour son septennat, les locaux de la sous-préfecture de Kamsar avaient été incendiés pour le problème de courant», rappelle Thierno Sadur Diallo, Sous-préfet adjoint de la localité. Lequel révèle que la CBG a commandé 5 groupes de 814 KW pour la nouvelle centrale inaugurée tambour battant en 2008. Mais hic, la CBG ayant décidé de ne pas se mêler de la chose, il fallait passer par EDG ou un autre opérateur privé. Or, l’appel d’offres international lancé par le Mystère de l’Energie n’aurait eu aucun écho. Le populo, impatient, ne savait à quel gérant se vouer. En mai dernier, une délégation du Cndd est accueillie en toute pompe dans le bled. Le Ministre Sécréteur permanent du Cndd annonçait la lumière koukai à Kamsar à partir du 25 mai. Mettant les autorités administratives locales sous pression. «Le ministre secrétaire-permanent du Cndd a fait cette déclaration sans se référer à nous. Cela nous a obligé à écrire à la CBG pour qu’elle nous donne quelque 170 millions de francs représentant plus de la moitié de la subvention annuelle qu’elle accorde à notre collectivité. Ce montant nous a permis de faire face à l’extension et à l’amélioration du réseau électrique vétuste de Kamsar village», note le président de la CRD.

Par ailleurs, l’Etat aurait promis une subvention de 400 000 dollars ricains, décaissable en quatre tranches au Comité de pilotage en charge du problème d’électricité de la zone. Selon le sous-préfet adjoint, la CBG aurait aussi promis une subvention de 500 millions de francs glissants au nouveau gestionnaire de la centrale.

Il a fallu la manif du 24 août pour que l’Etat annonce la libération de 450 millions de francs glissants soit 100 mille dollars. La CBG a été priée de filer 250 millions de francs glissants. De quoi mettre le jus pour la centrale afin de produire du courant pendant ce mois de ramadan. Mais certains estiment que ces deux contributions ne mèneront pas loin. Pour fonctionner, la centrale consomme quelque 450 litres de carbrulant par heure. C’est tout dire !

 

In www.lelynx.com


01/10/2009
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