Le blog de Bachir Sylla

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Une autre Guinée est-elle possible ?


Thierno Fodé Sow

Comment sera fait demain avec cette inconstance sans précédent ? C'est la lancinante interrogation que nombreux Guinéens se posent encore aujourd'hui. En fait, de la décadence morale et politico économique à la déchéance humaine, le raccourci est, somme toute, saisissant. Tant le panier de la ménagère est des plus pauvres, si ce n'est désormais inexistant. L'horizon s'assombrit. Une situation qui risque de se prolonger et plonger plus d'une famille encore dans le dénuement. Pour autant, une autre Guinée est bien possible.

Les champs sont abandonnés, faute d'une bonne politique agricole. On est loin de la LPDA1 et 2, dont se réjouissait à chaque occasion, un certain Jean Paul Sarr. D'engrais et d'outils de travail adéquats, nada !  Point donc de rentabilité pour l'agriculteur espérant vivre de son activité principale.

Au même moment, des jeunes qui se livrent aux vols à la tire, aux braquages, aux assassinats, bref à la dépravation. La banlieue de Conakry est infréquentable de jour comme de nuit. La morale a cédé la place au bafouillage des mœurs. Et la loi de la facilité a fini par gangrener l'esprit, même chez le Guinéen le plus réfractaire à la fainéantise et à la compromission. La situation est manifestement explosive, si on y prend garde.

Et comme si cela ne suffisait pas pour inhumer le citoyen lambda, certains esprits malins initient et nourrissent sadiquement des troubles et surtout, une maladive rancœur. En parcourant certaines familles ou en discutant avec certains pères de familles, on se rend compte que la lassitude est là. La population déjà éreintée par les soucis et la cruauté de la vie quotidienne, retient à peine son souffle. Si elle n'observe pas tout simplement -faute d'autres options- l'indifférence et le fatalisme. Les mouvements sociaux sont de trop. Le Guinéen a trop subi les atrocités des balles réelles ou des pillards affamés d'un autre âge. Et ce sont ces mêmes pillards déguisés qui soutiennent les principaux acteurs du naufrage guinéen. En contre partie, de honteux avantages.

La Guinée a trop versé des larmes puisque ses enfants ont trop perdu de leur sang. Et c'est triste pour un pays qui a tout et qui ne réclame que le mieux être. Un pays qui devrait d'ailleurs, accueillir du beau monde pour la main d'œuvre, au vu des diverses ressources dont elle dispose. Mais un pays qui souffre de ses richesses humaines d'abord, et économiques ensuite.

N'est-il pas temps de retenir son souffle ? De marcher en cadence. De placarder les armes, l'indiscipline, le règlement de comptes, la dérive ethnique, etc. Le dialogue ne devrait-il pas  être la seule vertu qui doive nous accompagner ? C'est un passage obligé. Qu'on commence par lui ou qu'on finisse par lui, le dialogue sera incontournable. Avant toutes émeutes, il y a une place pour le dialogue et la concertation. En temps d'émeutes, pareil. Pourquoi donc sacrifier tant de personnes, tant de richesses, tant d'efforts ?

La Guinée reste sous perfusion, retenons encore notre souffle ! Juste le temps d'une réconciliation et d'une concertation fructueuse entre nous, fils et filles de la nation (le gouvernement reconnaît déjà la responsabilité de l'Etat dans les disparitions et autres fusillades ayant eu lieu au sinistre camp Boiro).

Mais, bien sûr, cette démarche que je sollicite a tout de même un prix : revisiter la ''mentalité d'acier'' du Guinéen, faire table rase des clivages ethniques, érigés par les politiques, juste pour asseoir leur légitimité. Et puis – chacun le sait – même ceux qui ont portés ces politiciens sur le piédestal, sont aujourd'hui déçus. C'est une vérité de la Palisse.

« Votez pour moi, je vous bitume toute la République !», « Votez pour mon parti, je vous donne de l'eau et de l'électricité gratuitement ! », « Voter pour moi, je vous allège le coût du transport ! », « Votez pour moi, je vous construis une Université dans votre région ! ». Des balivernes de cette veine.

On aura tout entendu. Des refrains à vous couper le souffle. Ce ne sont que des discours populistes et électoralistes. Rien de plus ! Les premières victimes seront ceux là qui se seront donné corps et âme pour proposer et soutenir des candidats. Ce seront ceux-là aussi qui auront attisé la haine et la rancœur pour ces leaders politiques.

Je dis : « Oui, pour voter ! », c'est un acte civique. Mais « Non, pour l'emportement et le déchaînement des passions ! », qui ne conduiront qu'à l'erreur fatale vers laquelle les  politiques nous tirent, en nous transformant, hélas, en vivier à partir duquel ils se fertilisent.

Que chacun réfléchisse sur les possibilités d'en finir complètement avec la misère, la division et la haine. Des maux qui se sont transformés, au fil des ans, en frustration et en rancœur endémiques. Le tout boosté par une injustice sans précédent (mais ceci est une autre histoire). Que chacun revoie sa position par rapport aux urgences et aux nécessités nationales. Rien ne sert plus de s'attaquer aux personnes. Mais aux impératifs du développement. Ce sera seulement à ce prix, qu'une autre Guinée sera possible.

Loin des attitudes frileuses et insipides : discours laudatifs et immobilisme. Mais loin aussi des cadres et autres affairistes, au patriotisme chancelant. Les premiers et cruels brigands des Guinéens. Des Guinéens pour leur part, partagés depuis longtemps, entre gouvernance virtuelle et pseudo démocratie. Une situation que certaines personnes de l'ombre entendent saisir pour rêvasser. Mais pour quelle issue ?

L'impasse est totale, … la fringale pesante chez ces rêveurs. La disqualification tout aussi assurée. Car chacun aura compris les ambitions qui animent nos gouvernants. Vigilance ! Une autre Guinée est bien possible. Avec nous et pour nous : guinéens du pays et de la diaspora.  C'est un chemin difficile, mais tout de même, exaltant.

Thierno Fodé Sow
In (www.guineeactu.com)



22/10/2008
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